Brahmacharya, la voie du bonheur absolu

En quoi diffèrent plaisir et bonheur ?

Le plaisir est toujours éphémère et s’obtient avec des substances ingérées (comme la cocaïne ou l’alcool) ou sécrétées par le cerveau, comme celles générées par les réseaux sociaux, les jeux vidéo, le shopping, certains jeux de grattage ou la pornographie. Il est éphémère car il ne dure que le temps de vie de la substance dans notre système biologique. Mais ces substances ont un autre inconvénient: Elles peuvent nous rendre dépendant et donc nous faire souffrir de leur absence. Pire, elles constituent aujourd’hui la principale source de motivation de nos actions et le vieillissement de leur système de synthèse (dopaminergique) dans notre cerveau nous mènera tous au crépuscule de notre vie à l’absence de plaisir et de satisfaction.

A l’inverse du plaisir, le bonheur ne s’obtient pas par la prise de substances et n’est pas directement produit par le cerveau. Il est durable, non addictif et s’acquiert le plus souvent au sein d’une organisation sociale (famille, groupe de yoga, association de randonneurs…). Il se réalise par l’observation, la compréhension de soi et surtout le rééquilibrage de son système nerveux. Et si le plaisir est addictif, le bonheur nous libère de la dépendance et nous ramène à l’essentiel: l’ici et le maintenant.

Si nous avons tant de mal à faire la différence entre bonheur et plaisir, c’est parce que le plaisir est plus facilement accessible que le bonheur et n’oblige à aucune exigence morale. Il est en effet plus facile de s’auto-déclencher un shoot de dopamine dans notre cerveau que de s’obliger à venir régulièrement au yoga ou à concéder ses 8 heures de sommeil à son système nerveux pour qu’il se rééquilibre naturellement. Un joli slogan qui fait gentiment l’amalgame entre plaisir et bonheur, un « like », un mail, une petite coupe de champagne, un petit achat compulsif ? Et hop, un shoot de dopamine et un moment de plaisir ! La voie de la raison est toujours plus difficile à suivre pour ceux qui restent convaincus que le vrai bonheur est une succession de plaisirs et qui préfèrent les  substituts industriels au bonheur partagé et à l’intérêt du corps.

En vieillissant, notre cerveau fabrique moins de dopamine, nos récepteurs dopaminergiques s’endommagent et nous devenons de surcroît moins sensible aux piqûres de plaisir et aux récompenses. Une baisse de la motivation, l’apparition d’un diabète de type II, une impuissance, une baisse de l’accommodation visuelle (presbytie), des troubles de la mémoire ou encore l’apparition de tremblements sont des symptômes de vieillissement qui peuvent être également liés à une altération du fonctionnement du système cérébral de traitement des récompenses et à une défaillance en dopamine. A la différence de ce système dopaminergique, notre capacité de rééquilibrage sympatho-vagale ne vieillit pas et reste disponible, à condition bien-sûr d’en connaître les leviers et de pratiquer régulièrement leur activation jusqu’à retrouver notre condition naturelle.

La pratique du yoga traditionnel n’est pas le dernier substitut à la mode pour s’enivrer à la dopamine ou à l’ocytocine (l’hormone de l’attachement). Les vrais yogi ne considèrent pas le bonheur comme la conséquence naturelle d’une accumulation de plaisirs ou de biens matériels et éphémères. Le yoga est depuis toujours une pratique fondée sur le détachement et le renoncement vis à vis de l’éphémère et sur la quête du bonheur éternel par la non-violence.

Dans la philosophie du yoga traditionnel, la pratique qui invite à modérer ou à se détourner des plaisirs dicibles pour cultiver le bonheur indicible, éternel et infini est le brahmacharya.